Après plus de deux semaines à venir là tous les jours la regarder dans son coma, dans ce petit service de dix lits, il y a un patient qui est mort.
En arrivant en début d'après-midi, ma soeur avait failli se faire renverser par la jeune interne qui sortait en courant du service, en pleurs.
Ensuite elle avait vu les membres de la famille, effondrés dans le couloir, soutenus par des infirmières qui leur tapotait l'épaule.
Quand j'y suis allée quelques heures plus tard, à la porte j'ai laissé passer le lit avec le corps qu'on sortait du service. Médecins et infirmiers étaient calmes cette après-midi là, un peu secoués, dans une ambiance particulière d'équipe qui s'est battue pour un homme et qui vient de perdre.
On se doutait qu'il y avait un risque qu'on perde nous aussi.
Mais je m'étais dit qu'au moins j'avais vu comment ça se passait avec les soignants, et que si jamais, on aurait le droit à ça nous aussi. Pleurs émotion soutien choc ou tristesse.

Mais non en fait.
Ils n'ont pas réussi à se souvenir qu'on nous avait téléphoné au moment de l'agonie, et qu'on a sauté dans le métro pour venir, et qu'on n'est pas omniscients.

Ils ne nous ont même pas dit qu'elle était morte.