gamace - Home sweet home ou l'apprentie sagehttp://gamace.cowblog.frCe qui me tourne dans la tête et pour que ça sorte, pour le plaisir d'écrire et pour raconter la musique, parfois.CowblogfrWed, 26 Apr 2017 00:24:26 +0200180http://gamace.cowblog.fr/235-3278008.html- 235 -Je suis partie du boulot 2h avant (rattrapée hier et aujourd'hui) pour la répète des solos avec le grand chef, le gars a finalement changé le planning donc on passe dans une grosse demi-heure alors qu'on s'est tous dépêchés. Donc on se pose et je vois enfin le mail que j'ai reçu d'A., ma copine traductrice qui habite en Suisse, et qui m'annonce donc qu'elle est toujours vivante et qu'elle viendrait bien me voir, est-ce que je suis là autour du 20 mai (mon dernier concert et le week-end que je fais avec Alex et deux autres personnes dans le Mayo, qu'on est en train de finaliser, et auquel je lui avais proposé de venir il y a quelques mois mais maintenant c'est trop tard), parce qu'avec un dénommé Antoine qu'elle venait paraît-il de rencontrer la dernière fois qu'on s'est parlé - pas sûre que ça ait été dit - ils feraient bien un tour en Irlande et passeraient bien par "ma" ville.

Dublin n'est pas ma ville. L'Irlande est mon village et on n'y vient pas sans prévenir.
Et putain c'est quoi ce truc où tous les autres gens les plus impairables rencontrent des gens et je suis là cachée dans un escalier des studios radio de la RTÉ en pleine crise de larmes.
Transformable en crise de furie, c'est tout l'arsenal disponible.

]]>
http://gamace.cowblog.fr/commentaires-3278008.htmlWed, 26 Apr 2017 00:24:00 +0200http://gamace.cowblog.fr/235-3278008.html
http://gamace.cowblog.fr/234-la-pierre-et-le-bois-3274562.html- 234 - La pierre et le boisJ'aime bien prendre des photos. De temps en temps elles sont un peu penchées, un peu de traviole, de guingois, les couleurs sont pas terribles.
En général je sais cadrer, donc il peut y en avoir de bonnes.
J'utilise un "vieil" appareil, numérique, prêté par un copain il y a des années, dont je n'ai jamais bidouillé les réglages.

Mais surtout c'est les thèmes. 

Je prends très peu de photos de visages, de gens, même de foules ou d'inconnus.
Beaucoup de paysages, vides d'humains le plus possible, les maisons sont autorisées.

Et puis des espèces de "natures mortes" (cette expression m'a longtemps terrifiée, j'exagère à peine, je préfère largement l'anglais "still life").

J'aime les matières, les contrastes de matières, les détails, le petites choses, les briques, les arbres nus ou morts, les bouts de plantes qui jaillissent des murs, les serrures rouillées sur les vieux portails, les rivets de consolidation sur un mur de pierre fendu.

J'ai fini par remarquer ça et j'ai enfin décidé de m'y laisser aller quand ça me prenait.

http://gamace.cowblog.fr/images/DSCF4832.jpg 
Saint-Vidal, Haute-Loire, le portail entre le village et la cour du château.


http://gamace.cowblog.fr/images/DSCF5634.jpg   
Celle-ci et les suivantes viennent des jardins de Strokestown Park, County Roscommon, en Irlande
.


http://gamace.cowblog.fr/images/DSCF5650.jpg

http://gamace.cowblog.fr/images/DSCF5651.jpg


http://gamace.cowblog.fr/images/DSCF5653.jpg

http://gamace.cowblog.fr/images/DSCF5655.jpg

http://gamace.cowblog.fr/images/DSCF5663.jpg

http://gamace.cowblog.fr/images/DSCF5668.jpg

http://gamace.cowblog.fr/images/DSCF5669.jpg

http://gamace.cowblog.fr/images/DSCF5462.jpg
   
Sur le port de Killala, County Mayo, Irlande. Très Tristan & Iseult.

]]>
http://gamace.cowblog.fr/commentaires-3274562.htmlSun, 06 Sep 2015 22:20:00 +0200http://gamace.cowblog.fr/234-la-pierre-et-le-bois-3274562.html
http://gamace.cowblog.fr/233-notre-langue-est-portee-3274453.html- 233 - Notre langue est portéeJe lis en ce moment Remonter la Marne de Jean-Paul Kauffmann.
Ça me passionne moins que ce que je pensais ou espérais, mais enfin l'auteur a des lettres, écrit fluidement et agréablement, et j'ai particulièrement aimé cette réflexion sur le français, alors que l'auteur-marcheur arrive à Meaux, sur les terres de Bossuet :

Notre langue est portée naturellement à la grandiloquence, à la laque, à la parure, à l'amidon. "Trop de cosmétique" se plaignait Martin du Gard qui répugnait, dans ses livres, à utiliser des produits de beauté. Bossuet fait preuve d'une efficacité sans égale mais il aimait aussi bousculer les mots. Le bousculé, c'est peut-être cela, l'idéal. Une certaine imperfection, en tout cas de négligé - pas de négligence - que Jacques Rivière a parfaitement définie : "Je ne sais quoi de dédaigneux de ses aises, d'à moitié campé, de précaire et de profond, l'incommodité des situations extrêmes. Un esprit toujours en avant et au danger." Un modèle comme Saint-Simon commet lui aussi nombre d'incorrections et n'hésite pas à malmener la langue. Ce côté risqué, inconfortable, est ce qui convient le mieux au français. Quelque chose d'expéditif, de dégagé dans la tenue. Une forme de desserrement, venu sans peine. Pour moi le comble de l'élégance, la grâce. Mais il ne faut pas que cela se voie.

La citation de Jacques Rivière est tirée des Carnets (1914-1917), Fayard, 2001.
]]>
http://gamace.cowblog.fr/commentaires-3274453.htmlWed, 26 Aug 2015 19:30:00 +0200http://gamace.cowblog.fr/233-notre-langue-est-portee-3274453.html
http://gamace.cowblog.fr/232-sur-ma-peau-3274445.html- 232 - Sur ma peau 
Sur ma peau des cheveux des cils et des veines d'un certain bleu
Parfois sous la peau fine élastique de l'os ou des vaisseaux saillants, les ongles et leurs fameux cuticules
Des replis des bourrelets des taches, des poils de duvet et les autres longs courts 
Sur ma main des ampoules durcies, les traînées si légères des empreintes et des lignes
Une tache de naissance là à droite sur le thorax, des grains de beauté des boutons, des rouges, des noirs des blancs
Des zones plus claires et plus sombres sur ma peau, les pieds plus sales, des cals, d'anciennes ampoules à la peau morte et blanche
Sur mes cuisses les traces roses à cause de la bouillotte trop chaude et puis des vergetures, d'autres grains de beauté, de vieilles cicatrices éteintes au genou et aux mains.
La peau est rose, blanche, verte bleue jaune, légèrement bronzée par endroits
Les marques du pantalon, des sous-vêtements, plis chiffonnés, la trace ronde d'un bouton de ceinture
Sur ma paupière gauche un bouton blanc, les taches des lunettes sur mon nez, des cernes, leur forme leur couleur la peau fine, au cou la peau douce et épaisse des bien nourris.
Et sur le tendre de la gorge, les ongles encore ont créé des zones sombres.

Je les sens sous le tissu et croirais les poumons y prenant leur air.

]]>
http://gamace.cowblog.fr/commentaires-3274445.htmlTue, 25 Aug 2015 21:33:00 +0200http://gamace.cowblog.fr/232-sur-ma-peau-3274445.html
http://gamace.cowblog.fr/231-en-tenant-la-main-3274147.html- 231 - En tenant la main"Cet après-midi votre oncle V. est décédé, paisiblement en tenant la main de son épouse et de sa fille aînée."

Le mail arrive encore un peu plus tôt que prévu, mais enfin ça fait un an qu'il est malade, le cycle maison-hôpital-maison s'est accéléré, on s'y attendait. Et il est mort dans la maison de famille léguée par sa mère, chez lui - rare et presque précieux.

En la relisant je sens dans la phrase si factuelle - adverbe excepté - de mon père une approbation, une certaine envie même à l'idée de cette scène. Mourir chez moi, entre ma femme et ma fille, oui. Une envie mélancolique triste.
Il ne pourra pas tenir la main de son épouse, déjà décédée.


Et je réalise soudain, ou plutôt soudain la culpabilité me douche, m'avale, m'inonde, j'ai laissé ma mère mourir toute seule, toute seule, seule dans une chambre d'hôpital au fond d'un service de réanimation, dans le coma, seule, câblée de plastique entourée de métal, d'ombres, de vide, seule, détachée du monde par l'inconscience et notre absence, abandonnée.
Je suis venue la veille, tard, et j'ai fui.
Et j'aurais fui encore si le matin elle avait été vivante encore, j'avais trop peur de voir ça, le passage.
La honte, la honte, et je ne sais pas comment implorer pardon.

]]>
http://gamace.cowblog.fr/commentaires-3274147.htmlFri, 24 Jul 2015 01:27:00 +0200http://gamace.cowblog.fr/231-en-tenant-la-main-3274147.html
http://gamace.cowblog.fr/230-toujours-pas-3272586.html- 230 - Toujours pasMa mère est morte.
Maman est morte.
 Ma maman est morte.
Sa maman est morte doivent dire les autres.
Sa mère est morte.
Ta maman est morte.
Elle est morte.

Ca ne fait toujours aucun sens.

]]>
http://gamace.cowblog.fr/commentaires-3272586.htmlMon, 30 Mar 2015 00:52:00 +0200http://gamace.cowblog.fr/230-toujours-pas-3272586.html
http://gamace.cowblog.fr/229-generations-3271683.html- 229 - Générations
 
- Alors, tu as trouvé un nouveau boulot ? dit la tante à la nièce qui galère depuis longtemps avec ses deux master et des contrats à (très) court terme.
- Oui ! Dans telle université, tel poste au labo, un contrat de deux ans.
- Et voilà ce que c'est aujourd'hui, les salariés-kleenex : on prend, on jette.
- Ah mais moi je suis pas kleenex ! J'ai un contrat de DEUX ans !!

A côté, j'ai souri.
On ne vit plus dans le même monde.

]]>
http://gamace.cowblog.fr/commentaires-3271683.htmlSat, 07 Feb 2015 02:28:00 +0100http://gamace.cowblog.fr/229-generations-3271683.html
http://gamace.cowblog.fr/228-la-divine-tristesse-3271001.html- 228 - La Divine tristesse

 
 
Ma maman était une grande lectrice, une grande amateure de littérature, une grande admiratrice des classiques, de l'Italie, de Dante. Elle avait commencé une licence de lettres classiques, fini en lettres modernes. Elle avait fait du latin, du grec, de l'italien. Tout ça sans travailler suffisamment d'ailleurs avait-elle toujours dit, mais enfin c'était une littéraire, qui vivait entourée de bouquins, des grands classiques aux parutions récentes ; elle était d'une famille de lettrés, de papetiers savants, d'un grand-oncle qui avait découvert trois pensées inédites de Pascal et avait proposé une nouvelle classification de leur ensemble à la lumière de ces feuillets miraculeusement sortis du néant car il en aurait reconnu l'écriture. Classification pas particulièrement retenue par les spécialistes du genre mais qu'importe. Des gens cultivés.
L'Italie, Florence avaient toujours tenus une place particulière dans le coeur de ma mère. Elle avait une reproduction d'une toile représentant le Duomo vu depuis une fenêtre et une rose à côté, et avait été fort vexée quand je n'en avais pas voulu dans ma chambre. 
Elle vivait dans ce bouillon vaguement brouillon de culture qui n'avait pas pris forme - elle n'était ni professeur, ni traductrice, ni rien de professionnellement culturel - mais qui faisait partie de son être et de sa manière de (se) penser. La littérature, l'Italie, le grec, Chrétien de Troyes faisaient partie du grand ensemble de ses enthousiasmes admiratifs qui faisait d'elle quelqu'un de plein et de vivant.

Par ce qui n'est sûrement pas un hasard, c'est elle qui a hérité d'un vénérable camée présent dans la famille depuis des générations et représentant Dante. Il semble que cette lointaine branche de la famille ait été d'origine italienne. C'est une bague qu'elle portait tous les jours et je l'ai toujours vue avec.

Mon père n'avait aucune idée de pourquoi il était extrêmement touchant que ce soit sa femme, Béatrice, qui ait hérité de cette bague à l'effigie du poète florentin. 
Je le lui ai appris cet été.

J'ai envie de pleurer à chaque fois que j'y pense.




]]>
http://gamace.cowblog.fr/commentaires-3271001.htmlWed, 31 Dec 2014 21:57:00 +0100http://gamace.cowblog.fr/228-la-divine-tristesse-3271001.html
http://gamace.cowblog.fr/227-le-voyage-3269631.html- 227 - Le voyageElle avait mis six mois à le convaincre. C'en était devenu une blague, un running gag, un truc dont toute la famille était au courant. Même pendant l'été, quelques mois avant la date prévue du voyage, il riait en disant que c'était inutile : il avait déjà vu la gare centrale de la ville, lors d'un déplacement professionnel, nul besoin d'aller passer un week-end un Amsterdam pour fêter leurs 25 ans de mariage.
Mais elle avait réussi à le convaincre, tout était prévu, et elle prenait les blagues avec bonne humeur.
On avait aussi essayé de lui expliquer que du coup, avec sa femme, il allait peut-être visiter le reste de la ville, qui était censé avoir plus d'intérêt que la gare, même si ça ne faisait pas partie de son échelle de valeurs habituelle ; sans même parler du fait que s'il avait mis les pieds dans la ville, elle jamais, et que si elle avait envie d'y aller, et vu que le projet n'avait rien d'extravagant, l'idée de faire plaisir à son épouse pouvait être une motivation valable.

C'est l'été où les douleurs dans la nuque ont commencé, et après un léger mieux en septembre, ont empiré en octobre.

Je me souviens être descendue de ma chambre le matin où ils étaient censés partir, et d'avoir été étonnée de trouver ma mère dans le salon.
On repousse le voyage, me dit-elle, j'ai trop mal au dos, je ne le sens pas, je préfère attendre que ça aille mieux.

Je trouve mon père dans la pièce d'à-côté, qui mi-penaud mi-inquiet, me dit on repousse le voyage, Maman a trop mal au dos. Il était finalement tout déçu, après avoir semblé combattre le projet pendant des mois, et opposé une certaine résistance, faite de passivité et de gentilles moqueries de dénigrement, à l'unique expression de célébration de leur quart de siècle ensemble.
Ils avaient fait une grosse fête pour les 10 ans, on avait fait un petit voyage en famille pour les 20. On referait une grosse fête pour les 30.

Mais les douleurs ont encore empiré, et elle est morte six mois plus tard.
Elle n'est jamais allée à Amsterdam.

]]>
http://gamace.cowblog.fr/commentaires-3269631.htmlThu, 30 Oct 2014 00:56:00 +0100http://gamace.cowblog.fr/227-le-voyage-3269631.html
http://gamace.cowblog.fr/226-de-l-infamie-3268037.html- 226 - De l'infamieUne des trois toilettes du pub s'ouvre enfin, en sort une nana un peu mal fagotée, un peu outrancière, peut-être un peu trop ronde, avec probablement un peu de ventre qui sort entre la jupe trop courte et le haut à paillette, et qui traine au pied un mètre de PQ.
Je lève intérieurement les yeux au plafond de ma boîte crânienne en prenant sa place, ridicule, la juste illustration du manque de classe de ces gens, vraiment, je ne prétends pas moi-même faire des efforts si grands d'élégance - quoiqu'on m'ait déjà dit que je l'étais, et voilà qui prouverait une certaine prestance parisienne non pas innée mais presque automatique, finalement véridique par rapport aux anglo-saxons - mais laisser s'accrocher à sa chaussure, par ailleurs moche, traîner avec soi dans ses pas et surtout ne pas s'en apercevoir !, une aussi longue guirlande difforme et bientôt noircie de ce qui représente dans notre société tout ce qu'il y a de laid et de peu soigné ; je pense aux gens qui dégueulassent les toilettes publiques, je pense à ceux qui laissent du PQ dans la nature, dans les bois, la terre, les arbres, derrière les rochers, visions qui souillent un paysage entier ; non vraiment ça me paraît presque un symbole d'infamie morale.
Le papier toilette abandonné représente tout ce qu'il y a d'irrespectueux, de non noble dans l'attitude, de je-m'en-foutiste, de sale, enfin, dans notre monde, tout ce dont mon éducation m'a heureusement protégée.
J'en étais là de mes réflexions en finissant de me laver les mains, et en sortant des lieux une entrante me dit : attention, vous avez du papier toilette au pied.

]]>
http://gamace.cowblog.fr/commentaires-3268037.htmlWed, 20 Aug 2014 00:32:00 +0200http://gamace.cowblog.fr/226-de-l-infamie-3268037.html