Lundi 26 juillet 2010 à 18:45

Suite décousue et effilochée de réflexions après le billet sur les mains : pour moi qui suis plutôt "auditive" (ne me lancez par sur la définition) ; ainsi que nécessairement visuelle et plus que je ne le crois, comme tous ceux qui ne sont pas atteint de cécité ; qui suis parfois surprise par l'importance de certaines odeurs, agréables ou dégoûtantes. Finalement, le toucher reste une source importante d'information et peut-être de frustration.
C'est pour ça que parfois, je pense que menuisier doit être le plus beau métier du monde, en suivant du doigt l'accoudoir courbe et lisse du fauteuil d'ébène. Et c'est pour ça que je suis déçue par le musée Rodin ou autre entrepôt à statues et bustes, car admettez-le, comment voulez-vous apprécier une sculpture avec les yeux, sans l'enlacer ni la caresser, hein ?

Paradoxe d'ailleurs : les sculpteurs sont bien obligés de penser que finalement on n'appréciera leurs oeuvres qu'avec la vue. Seulement. Ca enlève un paquet de possibilités non ?
Et je vais apporter mon petit caillou dans ce problème grave de l'humanité que semble être la détermination de quel art est supérieur à l'autre (comme si) entre la musique et la peinture (avant d'y revenir j'espère dans un billet plus complet) : la musique est bien le seul ou presque qui s'adresse à autre chose qu'à notre vue.
Paf.
C'est fou hein ?
Bon, après j'ai commencé à essayer de me souvenir de la classification des arts tout ça tout ça, le 7ème on sait mais ceux d'avant ? Essayez sans tricher là... Et pi ceux d'après ? Bon, mais la définition de l'art finalement ??
Alors là j'ai laissé tomber, et je suis allée consulter la wikipédiatre comme dit Ka, sur
la classification des arts.
Fort intéressant. Des choses qui n'ont plus cours et qu'on aurait du coup même plus pensé à associer tellement nos représentations et nos catégories ont bougé, et puis d'autres qui vous nourrissent la boîte-à-penser que c'en fait du bien.

Mercredi 21 juillet 2010 à 16:55

Bon parce que quand même c'était si magnifique. 
Parce que ça valait le coup (le coût ?) d'attendre deux heures devant et de ne pas travailler à la place après l'avoir manqué dix jours auparavant. Parce que si j'ai vu cette exacte mise en scène il y a trois ans je ne me souvenais pas de tout et j'ai encore été charmée. J'ai retrouvé les décors qui s'escamotent et sont déplacés par les personnages mêmes, avec un style "coulisses apparentes", et qui au dernier acte semblent nous tourner le dos car plus personne vraiment ne s'intéresse à Cyrano, rimeur, bretteur, musicien...
J'ai retrouvé Eric Ruf et sa belle voix grave pour Christian, la robe chatoyante de Roxane, Le Bret encore jeune et qui voudrait tellement que son ami se calme alors il s'énerve lui, à l'opposé du souvenir d'un Le Bret résigné que je garde du film. De Guiche bien plus compréhensible que le comédien étranger invité de la dernière fois, la forte mise en scène de la bataille avec le boléro de Ravel qui m'a refait profonde impression, la cuisine de Ragueneau, Ragueneau dans chaque acte ou presque, Ragueneau au théâtre, Ragueneau sur le champ de bataille dans une drôle de machine et qui conduit Roxane en tenue d'aviateur, les coquelicots, les confettis rouges des morts, l'accent enfin du Comte qui va se battre, à jeung ! (jsuis désolée c'est pas dans l'ordre ce que je raconte), les nonnes, la blessure de Cyrano, Cyrano drapé dans le rideau et qui retient de Guiche (je ne me souvenais pas qu'il jouait autant avec le fait que le personnage est en train d'improviser, il reprend même le public, brisant soudain le jeu de l'histoire impénétrable, c'était étrange et drôle et génial). J'ai pu mieux voir le jeu avec la caméra au début, où Cyrano nous regarde dans les yeux et de haut pour provoquer le parterre en duel. J'étais très très proche, au troisième rang du parterre, devant l'escalier qui s'ouvre au devant de la scène et qui fait surgir ou bien avale les comédiens au moins trois actes sur cinq. Chrisian est mort juste là. Et j'ai pu voir les gens qui jouaient et je n'ai jamais réalisé qu'ils jouaient. Je les ai admirés, j'ai été impressionnée par tant de postillons ! Mais par leurs voix surtout et le texte qui est si bien dit et puis, et puis, enfin, surtout, je suis amoureuse de Michel Vuillermoz en Cyrano, voilà.
L'intonation et la prononciation et les nuances et la manière de poser les mots ou de les "laisser s'envoler" justement. Des frissons.
Et j'ai pleuré à la mort de Cyrano, c'est bête hein ?
Et je ne sais pas qui de la troupe avait son anniversaire hier mais bon anniversaire.

Et quand même parce qu'ils ont coupé des bouts, parfois pour de bonnes raisons et parfois c'est dommage, hop, de tête, je vous redonne celui-là que j'aime trop :
- Mais pourquoi protéger ? 
- Voilà le Bret qui grogne !
- Cet ivrogne banal ?
- Parce que cet ivrogne
Ce tonneau de muscat, ce fût de rossoli,
Fit quelque chose un jour de tout à fait joli :
Au sortir d'une messe, ayant, selon le rite,
Vu celle qu'il aimait prendre de l'eau bénite
Lui que l'eau fait sauver couru au bénitier
Se pencha sur sa conque et le bu tout entier !
- Tiens, c'est gentil cela
- N'est-ce pas la soubrette ?

Jeudi 15 juillet 2010 à 17:07

Parfois j'écris des billets comme le précédent, tard le soir, et c'est surtout pour me permettre d'aller dormir quand même. J'ai hésité mais je sais que c'est bien pour ça que j'ai ouvert ce blog et je n'en suis pas au stade de la censure. Et j'ai pu dormir. Et je voulais maintenant affirmer que ce n'était pas contre toi, ami lecteur, je ne t'en veux pas du tout et je suis désolée de t'avoir fait lire un truc pareil. A bientôt.

Jeudi 15 juillet 2010 à 1:21

Les larmes font un masque salé sur mes joues. J'ai mal au coeur aussi, je voudrais bien pouvoir vomir. J'ai recommencé à m'emplir de bruit et de nourriture plutôt que de tenter l'ascèse et le silence. Mais même l'opéra ne me console en rien, ou en tout cas ce n'est pas le bon, là aussi il y a des gens qui se trouvent. Je voudrais des réponses à mes pourquois, pourquoi, pourquoi. Marre. Ecoeurée. Des choses qui datent et sont encore là, s'enlisent, s'alourdissent, s'épaississent à chaque saison. Et si ça durait encore ? Encore trois ans, quatre ans, des années ? Et si j'en arrivais à faire craquer les jointures d'abord ? Je suis un peu violente, mais trop bien élevée pour taper sur les autres. C'est mes doigts qui sortiront des articulations, mes os qui se briseront, mon sang qui les aspergera. Ca devrait me soulager mais ça ne me donnera pas, toujours pas, ce que les autres semblent avoir. Qu'est-ce que c'est que ce chagrin intarissable. Des caprices. Mais tous les autres ont... Détails ! Plusieurs fois... Des caprices ! Ta faute. Seule explication. Malchance. Attend. Mais si ça me mange de dedans ? Pull yourself together bon sang. Serrer tout dedans, pour que ça ne déborde pas, se retenir d'inonder les autres. Avoir de plus en plus peur d'effriter leurs propres constructions en venant m'y répandre, ou de se faire rabrouer. 
S'organiser vite, s'occuper l'esprit, trouver des projets, des activités. Dormir pour pouvoir lire, lire donc ne pas dormir.

Mercredi 14 juillet 2010 à 17:03

Là, maintenant, hop, je devrais être en train de lire les derniers chapitres de L'insoutenable légèreté de l'être. J'ai bien envie de le finir hein, pour pouvoir passer à d'autres. Je n'aime pas trop lire différentes choses à la fois. Je trouve déjà que je lis trop vite, que je ne laisse pas le temps à l'histoire, aux personnages, à l'ambiance de s'installer ; alors si j'en croise plusieurs on ne s'en sort plus, le livre se dilue et j'ai la vague impression de n'avoir vécu, été immergée dans aucune des deux histoires. L'endroit où je lis déjà importe beaucoup. Vais-je lire dans le métro, et laisser les bruits, les autres gens, les anecdotes s'insérer entre les feuilles du roman ? Parfois oui ça m'amuse ou ne me dérange pas, ça peut lui donner une épaisseur personnelle et secrète, soufflée en parallèle par les circonstances de lecture. Vais-je continuer à lire l'histoire de Tereza et Tomas chez le coiffeur, et le salon de coiffure se déposer dans ma lecture aussi sûrement que les bouts de cheveux tombent dans la reliure (le bruit des cheveux mouillés qu'on coupe reste quelque chose d'extraordinaire). Ce qui se passe autour de soi pendant qu'on lit fera partie de la lecture et de ce qu'on retiendra de l'histoire, souvent. Souvent on se souvient bien de où on a lu tel ou tel livre. J'ai une amie qui a un excellent souvenir de vacances en famille à Venise parce qu'elle y dévorait Les Trois mousquetaires. A moins que ce ne soit l'inverse ? Je voudrais finir ce roman, attaquer la magnifique pile sur mon bureau formée de tout ce qu'on vient de m'offrir pour mon anniversaire, miam miam. Quoique d'abord j'ai un Agatha Christie tout à fait inconnu (de moi) et mystérieux déjà qui m'attend : Némésis. J'ai hâte. Mais je n'ai pas vraiment envie de finir Kundera. Enfin si, je veux savoir la fin, mais en sortir ? Sans être sûre d'avoir à peu près bien compris, retenu, que ça restera ? Je vais finir et je vais me précipiter dans autre chose, et pendant un temps tout va être flottant, les deux histoires se télescoper un peu, à moins que la seconde n'enterre prématurément la première, sans avoir l'étape du silence après Mozart... mes lectures forment parfois un continuum difficile à gérer, et j'ai peur qu'elles s'abiment l'une l'autre. 
Mais bon, il faut bien lire ! Enfin je veux lire. Et je dois bien insérer ça dans le reste. Souvenirs des livres avancés toutes les 55 minutes, au collège-lycée, posés sur le bureau ou le dessus du sac, et qu'on fait progresser à chaque intercours. Ou bien il m'arrive de me transformer en autiste complète pour dévorer sans que rien d'autre n'interfère, mais là, de même, cette situation un peu extrême s'inscrira dans mon souvenir du livre, on lit toutes ces histoires par des aménagements divers dans notre propre réalité. Je peux me souvenir à l'évocation d'un titre des motifs du tapis sur lequel j'étais allongée, des repas qu'on m'obligeait à prendre quand même, me tirant de l'autarcie littéraire, de la fenêtre ouverte et que je devrais me lever pour fermer, tant pis non, j'ai pris froid, des horaires tardifs, des yeux qui piquent, du métro, du train, de l'étagère où était le bouquin. Lire n'est pas une vue de l'esprit, c'est parfaitement concret, ne serait-ce qu'en étant confronté au fabuleux problème du temps-qui-passe-et-ne-subit-aucun-délai. Même là par exemple, alors que je ne lis pas, j'insère ces réflexions dans ce livre-là.
Bon allez je vais le finir quand même, on verra bien après :o)

Surtout que, en bonne élève que je suis, je n'admets dans mon petit carnet de lecture (ouais, j'avais un carnet dont je ne savais pas quoi faire, hop, lectures) que les livres dûment terminés. Lectures lues quoi. Je n'arrive à passer au bouquin suivant que si j'ai tout bien lu du début à la fin, première et dernière page comprises. Je réussis à m'accorder une dérogation sur les pré et postfaces, et encore, j'ai en réalité du mal à ne pas les lire, parfois pour mon plus grand malheur (c'est piégeux ces faces). En même temps, toujours à cause ou grâce au côté élève appliquée, je finis toujours les livres, je les lis dans l'ordre des chapitres, je ne saute pas de pages et je vais jusqu'au bout. J'ai dû ne pas achever 3 ou 4 livres de toute ma vie de lectrice-dévoreuse. c'est la sentence la plus radicale qui soit pour moi. Les trois qui me viennent en tête juste là, ce sont des bouquins que je n'ai même pas encore eu l'intention de ré-attaquer pour voir.
C'est pour ne pas rester en inspecteur des lectures finies que j'ai créé la petite rubrique "Lire, en cours" dans la colonne de gauche, pour que ces fameux livres que je laissais traîner pour ne pas les fermer définitivement puisse être reconnus si j'ose dire, et qu'un processus en cours puisse être inscrit comme existant.
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