Dimanche 28 juin 2009 à 16:44

[article à vocation éventuellement exorciste pour jour de fatigue déprimatoire]


Forcément je suis rentrée plus tard que prévu. J'avais faim. Non je n'avais plus faim. Trop tard. Pain et chocolat achetés, avalés, barbouillée.
J'étais partie un peu plus tard qu'espéré, déjeuner préparé au dernier moment, avalé trop vite, ordinateur éteint difficilement car conversations à finir, course dans l'appartement pour les clefs de la voiture, les affaires de sport...
Pas de place sous le viaduc du RER, grand détour, garée loin.
Arrivée en retard quand mon but avoué était pour une fois d'y être en avance, pour le dernier week-end de juin. Un peu honteuse un peu énervée.
J'ai ramé 1h30 avec une nana qui n'arrêtait pas de faire des remarques.
Je la connais, je savais que ce ne serait pas simple.
Mais vraiment : attention on n'est pas équilibrées (le bateau penche à gauche et à droite). Ben oui, c'est de l'eau, le principe c'est que c'est pas horizontal. Attention on n'est pas au même rythme. Oui ben, en fait, je t'explique, c'est moi qui suis à la nage, donc c'est mon boulot, et c'est TOI qui suit MON rythme.
Tous les quéqués étaient de sortie avec leurs (petits) bateaux parqués le reste de l'année au port, et qui nous regardent avec intérêt nous débattre dans les vagues de leur moteur trop puissant.
Elle a finit, au retour, par gueuler sur le seul qui ne causait pas de remous derrière, bateau à fond quasiment plat. Tout m'énerve.

Je suis repartie trop tard et passée au supermarché. 
Ma grand-mère était arrivée, mes parents absents pour le week-end. Je dois relayer ma soeur pour lui faire la conversation, attendre mon oncle, je ne peux disparaître me goinfrer de chocolat, m'allonger, faire une sieste avant de tenter de travailler. Je n'ai éteint qu'à 4h du matin la veille, pour finir mon roman. J'ai dû me lever relativement tôt, mais n'ai pas bossé.

Ils partent. Il est 19h déjà, je m'étais dit que je repasserais chez moi prendre un bouquin, mon chargeur de portable...
Je pars en métro, le ventre écoeuré par mon goûter excessif. Je traverse la gare, m'arrête au guichet pour des renseignements, je n'achèterai pas mon billet ce soir.
Sur la 14 un joli garçon, qui prend ensuite la 12 comme moi, et quand je finis par croiser son regard dans l'ascenseur de la station Lamarck, change de côté pour que je ne le voie plus, et sortira en courant.

Il est tard, je prends les quelques choses dont j'ai besoin, pique une petite déprime, les nerfs pelotés par les voisins du dessus et leur techno à fond.
Je repars, il fait encore jour, je veux marcher. Je remonte la rue Damrémont jusqu'en tout en haut ce que je n'avais jamais fait et décide de ne pas tourner à droite vers la place de Clichy ; je continue rue Joseph de Maistre puis rue des Abbesses. Cafés, bistrot, samedi soir, tout Paris dîne en terrasse, entre amis ou amoureux.
Théâtre de l'Atelier, je continue dans des rues moins éclairées, voit de beaux plafonds dans des appartement allumés, je descend la rue de Clignancourt et allait continuer à pied. Mais je me souviens de la vue du Canal St Martin qu'on a en prenant la ligne 2, va pour le métro.
Erreur, il faudra ensuite que je prenne la 5, je sortirai donc avant que la rame ne surplombe le canal. Barbès à Stalingrad. Changement long, métro raté.
Assise dans la 5 mes larmes dégoulinent un tout petit peu.
Une jeune fille entre dans la rame disparaît de ma vue, puis je l'entend derrière moi débiter sa demande. 24 ans, étudiante, concours de circonstance, rue. J'imagine que c'est vrai. J'en ai mal au coeur. Il y a tellement de gens dehors, les mêmes qu'on croise tout l'hiver, chacun son coin de rue, ça me rend malade. La lecture, même en diagonale, de la revue d'ATD Quart-Monde que ma mère reçoit toujours me plonge à chaque fois dans un profond malaise.
Je lui ai donné un peu d'argent avec une grimace qui avait trop de significations en même temps pour être claire, j'espère juste qu'elle n'y a pas vu du mépris.

A Bastille je suis sortie en face du café où travaille mon cousin, entre ses recherches de boulot. Je pensais qu'il ne servait pas le samedi soir, mais il est là.
Ca va ? Pas tellement mais ça va passer.
Il m'a proposé d'attendre qu'il finisse son service en discutant avec un ami chilien à lui qui venait d'arriver à Paris.
La nuit était déjà tombée, le ciel était d'un bleu très très foncé, qui avait été roi, au dessus de la colonne vert clair et de l'ange doré.
Quelques groupes restés de la Gay Pride, je discute en anglais avec Pio le chilien qui habite Barcelone. Les serveurs rangent tables et chaises et nettoient la terrasse.
On va boire un verre au bistrot d'à-côté, il est plus de 22h, j'aurai dû rentrer travailler plutôt... aïe
D'autres chiliens rallient Bastille, j'essaye attentivement de comprendre quelque chose à l'espagnol.
On repart à pied à 1h passée après 2 ou 3 bières (ben au prix où c'est), je trouve ma soeur dans le jardin qui entoure l'immeuble, avec une copine. Ma grand-mère est rentrée du théâtre et couchée. C'est à moi de me lever demain matin pour partager le petit déjeûner. Je remonte à l'appartement, ne peut résister à l'ordinateur encore allumé, je ne sais plus ce que j'y fais.

Matin difficile, je repousse le lever prévu par le réveil, descend, ma grand-mère déjà devant son café, un peu de conversation, j'entends ma voix rauque. Elle s'assoit pour lire en attendant son fils. Je m'allonge sur le lit de mes parents, somnolence bienfaisante, corps détendu, mais vite assailli par l'esprit réprobateur. Me relève avec effort, ce n'est pas encore l'heure.
Retourne, prend un grand gilet, pleure un peu, lit des paragraphes au hasard dans la revue Etudes, tout à l'air passionnant.
  Mais putain est-que tu ne peux pas te passionner 5 minutes pour ce que tu es censée faire, genre comme ça tu le ferais tu vois, et après tu lirais d'autres trucs, sur Allemagne-France un avenir commun, La psychiatrie par temps de crise, Les paradoxes de la parentalité tout ça.
Comment ça qu'est-ce que tu es censée faire ?



Mercredi 24 juin 2009 à 23:12

Mais qu'est-ce qui vous bloque ?
Mais je ne sais pas mon brave, je ne sais pas.

Il pense que ce serait comme une impossibilité d'achever, de mener les choses à terme, de parvenir à un accomplissement. Je crois qu'il a utilisé un autre mot, que j'ai oublié dans l'heure.
Au travail comme dans la vie.

Je traîne, ça traîne. 
L'anecdote est devenue fameuse : un exposé que la prof avait refusé d'entendre, pour cause de hors sujet (bon elle était à incriminer dans l'histoire m'enfin bref), elle me laissait une chance, on était mercredi, je n'avais qu'à essayer de proposer quelque chose pour le vendredi. Je choisissais mon sujet dans l'après-midi, faisais des recherches le jeudi, jetais le tout sur un papier le vendredi au déjeuner et donnait l'heure d'après une performance magistrale, qui me valut un 17 et demi.
On a dit depuis lors : je ne travaille que dans l'urgence.

Mais mon incapacité à travailler petit à petit tranquillement sur le long terme prend des proportions alarmantes, surtout lorsqu'on sait pertinemment que dans le cas présent, il est impossible d'accomplir quelque mémoire que ce soit en deux jours.

Mais envoyer un mail pour fixer des dates, téléphoner pour un stage, déposer une validation, rédiger une lettre de motivation, dès que c'est relié à mon activité principale, ça bloque.
Même un bouquin sur le chant tiens, depuis qu'on m'a dit que oui pourquoi pas j'avais le droit d'en faire beaucoup, l'année prochaine tout plein même peut-être, paf, j'ai bloqué sur le bouquin.
J'ai relu deux fois chaque phrase, au minimum. Je faisais des pauses pour comprendre les mots, relisais encore, essayais d'articuler avec la phrase d'avant, tentais d'approcher la phrase d'après, l'impression que mon cerveau est en bouillie, inapte au moindre effort, désentraîné de tout exercice intellectuel.
Et voilà qu'aujourd'hui qu'il fallait vraiment que je le rende à la bibli, après 2 prolongations, je lis la fin en 20 minutes ! Debout à mon bureau, en partant, l'esprit concentré, l'oeil survolant la page, le cerveau au taquet.

L'urgence je vous dis.
Je ne réagis qu'à l'urgence.

Comme par exemple un portable qui s'enfonce, descend, glisse et va disparaître dans les eaux vertes de la Marne...
  !!!
Mayday mayday !!
Mon cerveau est allé plus vite que son ombre, il a semble-t-il calculé que si je m'aplatissais d'un coup sur le ponton du club d'aviron et que je plongeais mon bras dans l'eau ça ne suffirait pas, qu'il ne voyait donc qu'une solution, il fallait que je saute.
Alors j'ai sauté.
En jean-converse-Tshirt-veste. Encore heureux que je n'ai pas eu de sac sur le dos.
J'ai entendu les enfants sur la rive opposée avec des petites voix aiguës : "mais elle est fooolle !!"
Une fois ressortie, mes co-rameurs qui ont assisté à la scène de la fenêtre du club mais sans repérer l'élément déclencheur "portable" : "un coup de chaud ?"


J'ai donc débarqué en soirée avec un gros sac de fringues mouillées, un portable désossé et une histoire parfaite pour jouer au téléphone arabe (et sans sous-vêtements).

Brevet de secouriste en portable (en Marne, elle était bonne tiens d'ailleurs si ça vous intéresse).


A ce jour mon portable est toujours en morceaux à côté de l'ordinateur, je l'ai passé au sèche-cheveux un peu, je prie pour qu'il fonctionne quand je le reconstituerai !


Jeudi 4 juin 2009 à 12:59

On a parlé psychiatrie un peu hier, maladies psychosomatiques et rémission, émotions, biologie et chimie (quoique je n'ai pas tellement eu le temps de développer mes arguments).
Je me souviens de mes quelques cours de psychiatrie, où l'on est pris par un vertige : est-ce purement neurologique ou purement psychique ? La psychanalyse fonctionne, a des effets, mais les anti-dépresseurs et leurs petites molécules également ; et dans l'immense complexité de la construction de notre corps, où chaque grain de beauté sur notre peau témoigne bien d'un mini-bug de la fabrication de mélanine, il est bien imaginable qu'il y ait eu des mini-bugs aussi dans le cerveau. Hop, un petit surdosage de tel neuro-transmetteur, oups, celui-là un peu moins qu'une éventuelle "moyenne" et voilà : votre caractère façonné en moins de deux.
(quand on voit les effets d'un traumatisme crânien, accident de voiture ou autre, sur le caractère de la personne, au début, c'est impressionnant).

On a soldé ça par un habituel : "la vérité (ou la réalité) est entre les deux".

Et aujourd'hui au hasard de lemonde.fr je tombe sur
cet article, qui commence par la méfiance accrue face aux Thérapies Cognitives et Comportementales. Puis se prolonge par les dessous du "classement" des maladies mentales, comment décide-t-on de ce qui en est, ou n'en est plus. Tout ça dans un drôle de mélange entre vieilles théories, industrie pharmaceutique, politique et médecine, un peu.

"En témoigne le livre de Christopher Lane, qui a été un best-seller en 2007 [Comment la psychiatrie et l'industrie pharmaceutique ont médicalisé nos émotions]. Prenant l'exemple de la timidité, qui n'est en rien une maladie mais une émotion ordinaire, l'auteur, spécialiste de l'époque victorienne et des cultural studies, dénonce la manière dont le fameux DSM (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux) - élaboré par l'American Psychiatric Association (APA), puis adopté dans le monde entier à travers l'Organisation mondiale de la santé (OMS) - a permis, en une trentaine d'années, de transformer en maladies mentales nos émotions les plus banales, pour le plus grand bonheur d'une industrie pharmaceutique soucieuse de rentabiliser des molécules inutiles : contre la crainte de perdre son travail par temps de crise économique, contre l'angoisse de mourir quand on est atteint d'une maladie mortelle, contre la peur de traverser une autoroute à un endroit dangereux, contre le désir de bien manger parfois avec excès, contre le fait de boire un verre de vin par jour ou d'avoir une vie sexuelle ardente, etc.
  Grâce au DSM, nous sommes donc invités à nous considérer comme des malades mentaux, dangereux pour les autres et pour nous-mêmes. Telle est la volonté hygiéniste et sécuritaire de cette grande bible de la psychiatrie moderne.
[...]
Après avoir lu ce récit, on se demande qui pourra faire barrage un jour à l'expansion de ces thèses aberrantes, comparables à celles du Docteur Knock, et qui ont pour objectif de faire entrer l'existence ordinaire des hommes dans des tableaux sombrement pathologiques, au prix d'oublier que les fous peuvent être vraiment fous."


A l'aube d'un nouvel eugénisme d'autant plus insidieux qu'il n'est pas imposé dans la violence par un régime politique, et qui nous encouragerait, par la mode du "développement personnel", à gommer nos différences, nos aspérités et à être de plus en plus normal, dans la norme, sur la norme dans de plus en plus de domaines de la vie.
Ca sera alors aussi faux et mort qu'un ensemble de violons recréés par informatique qui ont chacun un la très pur à 440Hz exactement.

Mardi 2 juin 2009 à 0:44

Je déteste (je hais) les fins de week-end sur les quais de gare
Et tous ces couples qui s'embrassent

Je voudrais en gifler





oui je sais

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